Il n’est pas rare que je reçoive des courriels de
parents qui se questionnent sur la façon d’aborder la sexualité avec leur
enfant : « À partir de quel âge aborde-t-on la sexualité? Quels
thèmes peut-on aborder avec eux? Jusqu’où aller? Comment en parler? »
L’éducation à la sexualité des enfants rend plusieurs parents anxieux et s’il y
a un thème qui semble rendre beaucoup de parents inquiets, c’est
l’homosexualité. Certains parents se questionnent sur l’impact que ça peut
avoir sur leur enfant : « Est-il prêt? Va-t-il comprendre?
Est-ce que ça peut faire en sorte qu’il devienne gai? » Ce questionnement
existe aussi chez les parents dont un enfant plus vieux a fait son coming-out : « Que
devons-nous dire au petit frère ou à la petite sœur? ». Derrière ces
questionnements se trouve toujours la même inquiétude : celle d’être un
bon parent pour ses enfants et la crainte de « faire la mauvaise affaire ».
Une des craintes que je constate
est celle associée à la compréhension des enfants de la sexualité. Plusieurs
adultes ont l’impression que parler de sexualité avec leur enfant « va
leur mettre des images dans la tête ». Il faut surtout se souvenir de
départager les notions « orientation sexuelle », « activité
sexuelle » et « faire des bébés » lorsqu'on leur parle de
sexualité, car même si ces concepts sont parfois liés, c'est faux de dire
qu'ils sont toujours associés. De plus, si on veut aborder l’homosexualité avec
les enfants, si tous ces concepts sont mélangés, ils auront du mal à
comprendre.
Tout d’abord, vous pouvez
aborder l’aspect relationnel en expliquant simplement : « Une
personne homosexuelle, qu'on peut aussi appeler « gai » quand c'est
un homme » ou « lesbienne » quand c'est une femme, c'est une
personne qui est amoureuse et qui est attirée par une personne du même sexe
qu'elle. Moi tu vois, je suis hétérosexuelle (si c'est le cas). Hétérosexuelle,
ça signifie être amoureuse et attirée par une personne de l'autre sexe. Et il y
a aussi des personnes qui peuvent tomber amoureuses et être attirées par des
personnes du même sexe qu'elles et par des personnes de l'autre sexe. On
appelle ça la « bisexualité ».
Parfois, les enfants ont des
points d'interrogation dans les yeux et abordent la question des
bébés : « Oui, mais deux filles ou deux gars, ça ne peut pas
faire des bébés? ». Ce à quoi on peut répondre : « Tu as
tout à fait raison! Pour faire des bébés, ça prend un homme et une femme, car ça
prend une petite graine de l'homme, qu'on appelle spermatozoïde, qui va
rejoindre une petite graine d'une femme, qu'on appelle l'ovule. Le mélange du
spermatozoïde et de l'ovule va créer un bébé 9 mois plus tard. Mais tu sais,
même si deux femmes ensemble ou deux hommes ensemble ne peuvent pas créer de
bébé, ça ne les empêche pas de s'aimer et de former un couple. C'est comme
(nommer un couple hétérosexuel sans enfants de votre entourage) : ils
n'ont pas d'enfant, mais ils s'aiment très fort et sont bien ensemble. Et
aussi, tu sais, si un couple ne peut pas créer un bébé, qu'il soit hétérosexuel
ou homosexuel, il est toujours possible d'en adopter un (vous pouvez même
ajouter « comme... » si des enfants dans votre entourage ont été
adoptés). Il y a donc des enfants qui ont deux papas, d’autres deux mamans et
d’autres comme toi qui ont un papa et une maman. Et tu sais quoi? Tous les
parents aiment leurs enfants ».
Pour les enfants, surtout chez
les plus jeunes, ils n’associent pas l’aspect sexuel et érotique à un couple
d’amoureux. Pour eux, être en couple réfère à des comportements comme se tenir
la main ou à se donner des bisous. Même si certains enfants rigolent en parlant
de « faire l’amour », la sphère sexuelle reste une énigme pour eux. À
moins d’avoir été exposés à du matériel pornographique ou avoir surpris leurs
parents, ils n’auront pas de représentation de la sexualité, et ce, jusqu’à la
fin du primaire (De La Vega et Thériault, 2001). Les enfants ont une vague idée
de ce qu'implique « avoir des relations sexuelles » et il est souvent
surprenant de voir ce qu’ils ont compris lorsqu’on discute avec eux (certaines
confusions, informations manquantes et partielles et parfois, incompréhension
totale). Les adultes ont tendance à transférer leur compréhension d’adulte de
la sexualité sur les enfants. Par contre, il n’est pas pertinent de parler de
l’aspect génital d’une relation amoureuse à un enfant, à moins qu’il vous
questionne directement sur le sujet, ce qui est rarement le cas pour les
raisons évoquées plus haut. C’est vrai pour parler de l’homosexualité et c’est
vrai pour parler d’hétérosexualité.
Comme adulte, nous savons qu'il
existe beaucoup de préjugés et de violence envers l'homosexualité. Les enfants
n'auront pas spontanément ces préjugés : c'est plutôt les propos négatifs
d'autres adultes qu'ils entendront qui risquent de faire en sorte qu'ils
développent une attitude homophobe. Si la façon de présenter l'homosexualité
d’un de vos enfants à vos autres enfants est positive, pleine d'amour et de
non-jugement, vos enfants cadets risquent de prendre la même attitude.
Pour plus d’informations
concernant la façon d’aborder la sexualité avec vos enfants, je vous suggère de
consulter l'excellent livre « Parlez-leur d'amour... et de
sexualité » rédigé par la sexologue Jocelyne Robert.
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