Vous êtes-vous déjà demandé « À quoi sert le sexe dans ma vie? ». Il s’agit d’une question que j’adresse régulièrement aux personnes qui viennent me voir. Plusieurs sont étonnées de la question. Comme s’il s’agissait d’une évidence. « Ben… comme tout le monde là… Normal… », ce à quoi je réponds : « Dans mon bureau, ça ne signifie pas grand-chose être normal. Pouvez-vous me parler de comment ça se passe pour vous? ».

Ce serait faux de croire que la sexualité vise toujours un plaisir solitaire, en couple, en groupe ou une façon de célébrer la vie. La sexualité sert parfois aussi à combler d’autres besoins relationnels : une façon de se réconcilier, un moyen d’acheter la paix, un outil de marchandage, un mécanisme pour éviter les conflits. La sexualité sert parfois à combler son désir amoureux, cette envie d’être proche et de faire qu’un avec l’autre. Parfois, la sexualité sert à jouer, à explorer ses limites, à célébrer le corps en éveil érotique. La sexualité peut aussi viser à se couper de ses souffrances, à évacuer un stress, à diminuer les tensions ou à tenter de s’endormir.

Est-ce qu’il existe des mauvaises façons d’utiliser le sexe? Mis à part s’il sert à détruire les autres au sens propre comme au figuré, non. Certaines personnes vont utiliser le sexe pour plusieurs fonctions, en même temps ou une après l’autre. Quand les gens sont conscients des besoins qu’ils sont en train de combler et que les autres personnes impliquées savent aussi de quoi il est question et que tout le monde est d’accord, c’est parfait. Les défis arrivent lorsque les gens ne prennent pas conscience des besoins qu’ils sont en train d’essayer de combler. Et ces problèmes arrivent souvent lorsque les besoins à combler ne sont pas sexuels.

Les émotions et le sexe
Les sensations ressenties lors de la sexualité peuvent être très fortes. Les hormones relâchées dans le corps lors des relations sexuelles et de l’orgasme permettent de ressentir un grand plaisir et un relâchement des tensions. La sexualité peut alors agir comme une drogue et donner un « shoot » d’hormones rapide pour soulager les tensions et amener une sensation agréable. Le défi arrive lorsqu’une personne a un grand vide émotionnel et n’arrive pas à le remplir. Certaines personnes utilisent la sexualité pour remplir le trou en elle sans avoir trouvé des bouchons pour que cette sensation reste, sans avoir à chercher un nouveau « shoot » quelques instants plus tard. Les personnes ont alors le sentiment d’avoir « une grosse libido » alors que dans les faits, ce n’est pas une question de désir sexuel. C’est l’équivalent de manger quand on se sent triste, car le poids de la nourriture donne l’impression que l’émotion est moins grande. On se trompe sur ce qu’on est en train de remplir.

Un des indices que le sexe n’a pas de fonction sexuelle est si vous avez des contacts sexuels seul.e ou avec une autre personne dans le seul but de relâcher une tension le plus rapidement possible. Que vous n’avez pas de fantasme, pas d’images, pas de scénario. Ces situations présentent souvent le sexe comme une façon de diminuer une émotion qui prend trop de place : le stress, l’anxiété, l’ennui ou une sensation de vide intérieur.

S’il s‘agit d’une situation qui vous parle et que vous avez envie d’explorer ce qui se passe à l’intérieur de vous, communiquez avec moi ou avec un.e autre sexologue; nous regarderons ensemble comment la sexualité peut devenir un peu plus sexuelle.

**Article originalement diffusé dans le Journal le Canada Français